Romane Boulard : une para-athlète multiDYS
Enfant, Romane s’est essayée au judo puis à l’équitation. Et puis un jour, une éducatrice de Sessad (Services d’éducation spécialisée et d’aide à domicile), Marion, « en a parlé à mes parents ». Athlétisme handisport. Cette pratique sportive qui, entre autres, développe la coordination motrice et le lien social.
« Je voulais essayer de voir et ça m’a ouvert. J’ai rencontré d’autres personnes, j’ai accepté mon handicap ». Lequel ? Dyspraxie motrice. « Cela veut dire qu’elle n’a aucune idée de représenter son corps dans l’espace », indique Julien Lemardelé. Un trouble, associé à une légère hémiplégie, qui la classe dans la catégorie T38, précise son entraîneur.
« C’est un handicap de naissance, explique Romane. J’ai du mal à faire les choses. Mais je vis avec et c’est grâce à l’athlétisme que j’ai compris que je n’étais pas le seul. »
11e Championnats du monde para-athlétisme
1 350 athlètes et 107 nations.
Troisième édition sur le sol français (après Villeneuve-d’Ascq en 2002 et Lyon en 2013), les championnats du monde de para-athlétisme – Paris’23, ont débuté samedi et se termineront le lundi 17 juillet, au stade Charléty.
C’est à l’ASM (que Romane a éclos. Dans une section handisport « super sympa, un vrai groupe, une famille », elle s’enflamme. Et sous la direction d’un technicien pédagogique. Merci encore. « Julien est un très bon entraîneur, c’est grâce à lui que je suis là. Je sais qu’il est là. J’ai de la chance de l’avoir. »
Sixième performance mondiale !
Au club, où la pratique de l’athlétisme dissipe son angoisse, la Clermontoise casse la carapace, s’épanouit. Elle pousse les portes de l’international après des débuts multidisciplinaires en 2015. « J’ai testé le 100m, le 200m, le 400m – c’est dur et j’ai arrêté – la longueur et le poids, j’ai aimé. Mais j’ai cherché où je pouvais être sélectionné ».
Je suis souriante, joyeuse, à l’écoute, mais plutôt têtue.
Ses qualités sportives donnent corps à son ambition, mais pas seulement ; son sens de l’écoute, sa totale implication aussi. « Elle est travailleuse », admire Julien Lemardelé. Peut-être une variante de ce que son élève juge, elle, comme le pire de ses défauts : « Je suis plutôt têtue », avoue-t-elle volontiers avec son sourire enjoué. Ses clés du succès pour la compétition.
« J’aime faire des compétitions, on se parle, ça m’apporte beaucoup de choses. Je me suis découvert, ça m’a aidé », apprécie Romane. Plus dans le ressenti que dans le récit d’anecdotes en tous genres. Sa participation aux Jeux paralympiques européens de la jeunesse 2022 en Finlande, l’athlète la résume en quatre mots qui en disent long : « une très belle expérience ».
Aux Championnats du monde de para-athlétisme à Paris, le sprinter-sauteur asémiste cherchait deux billets. « Le 200m était un peu relevé, avoue le coach, mais le contrat est long là ». Combiné avec France Handisport à Saint-Etienne. En tombant à 4,24 m dans le bac à sable du stade du Lux, le 9 juin, la Clermontoise a même réalisé la 6e perf mondiale. Entraîneur. Julien Lemardelé, entraîneur de Romane Boulard depuis 2015. Photo Rémi Dugne.
« Elle devient vite émotive. Quand elle a appris sa sélection, elle a tout de suite fondu en larmes », révèle-t-il. En même temps que le champ de ses possibles : « Un pari est faisable, un podium mondial. Et si elle le fait, elle a 80 % de chances d’aller aux Jeux Paralympiques. C’est l’objectif ».
Réponse le 13, à Charléty, un stade qu’elle connaît bien. « Elle a fait quatre compétitions là-bas. On a apprivoisé le lieu », explique Julien Lemardelé. En tant que compétitrice, Romane place la barre haute. « Mon objectif sera de battre mon record, de faire environ 4,60 m, et de profiter de l’épreuve. Puis il y aura les Jeux de Paris en 2024, un autre rêve ».
Romane Boulard en quelques mots
Né le 3 mai 2001 à Beaumont ; 1.70m. Travaille à l’ESAT du Brézet. Club : ASM Handisport depuis 2015. Handicap : paralysie cérébrale (T38). Multi-médaillé au championnat de France en saut en longueur, lancer du poids et 60 m.