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L’exposition à un mélange de perturbateurs endocriniens pendant la grossesse a des effets sur le bon fonctionnement du cerveau des enfants

Grâce à une étude collaborative internationale impliquant une équipe de recherche du laboratoire Physiologie moléculaire et adaptation – PhyMA (Muséum national d’Histoire naturelle – CNRS), une corrélation établie entre un retard de langage chez des enfants et leur exposition à des polluants chimiques communs (perfluorés, bisphénol, phtalates) pendant la grossesse, a pu être validée expérimentalement grâce à des modèles cellulaires et in vivo. Cet article parait aujourd’hui dans la revue Science. Il ouvre la voie à une nouvelle stratégie d’évaluation des risques.

Les découvertes scientifiques sont souvent sectorisées : des études épidémiologiques d’un côté et des études de laboratoire et des modélisations de l’autre. L’article qui parait aujourd’hui dans Science décrit une étude translationnelle intégrant un ensemble de données usuellement déconnectées les unes des autres. Une étude épidémiologique (SELMA) basée sur une cohorte de 1800 femmes enceintes / enfants en Suède a permis de corréler des effets sur des enfants de 30 mois avec une exposition à un mélange de produits chimiques, subie in utero. Ces résultats ont ensuite été testés dans plusieurs laboratoires européens et nord-américains. Ce travail collectif démontre qu’un mélange de huit produits chimiques composé de phtalates, de bisphénol A et de composés perfluorés, mesurés pendant la grossesse dans le sang ou l’urine des futures mères, affecte le nombre de mots que leurs enfants sont capables de prononcer à l’âge de 30 mois.

Ce mélange de produits chimiques a ensuite été recréé afin d’en décortiquer les modes d’actions en laboratoire : des effets de perturbations hormonales (thyroïdienne, oestrogénique, cortico stéroïde) ont été démontrés à l’aide de cellules souches neurales humaines et de modèles aquatiques. L’hormone thyroïdienne est l’une des clés des voies hormonales affectées. Des niveaux optimaux d’hormones thyroïdiennes maternelles sont nécessaires en début de grossesse pour la croissance et le développement du cerveau. « Il n’est donc pas surprenant que l’on retrouve une association entre un retard de langage et une exposition prénatale » commentent Barbara Demeneix et Jean-Baptiste Fini, tous deux auteurs seniors et professeurs du Muséum national d’Histoire naturelle à Paris. C’est la première fois que l’utilisation conjointe de modèles cellulaires et aquatiques permet de valider le mode d’action supposé de la perturbation hormonale. Une reconstruction des réseaux de gènes modifiés par cette exposition au mélange, effectuée par la Dr Michelle Leemans, co-première auteure, permet d’apprécier la complexité des modifications engendrées au niveau cellulaire par ce mélange de produits chimiques. En reliant ainsi différentes disciplines, les scientifiques ont pu montrer que l’utilisation de ces nouvelles méthodes aurait considéré que 54 % des enfants inclus dans l’étude SELMA avaient un risque du retard de langage car exposés avant la naissance à ce mélange de substances chimiques.

Cette étude propose ainsi une nouvelle approche d’évaluation du risque et montre la nécessité d’élaborer de nouveaux principes pour la mise en place de seuils de sécurité face aux mélanges de produits. Certains produits chimiques auxquels la population est exposée ont, en effet, des propriétés de perturbation endocrinienne, et peuvent être dangereux pour la santé humaine et animale. Si les niveaux d’exposition aux produits chimiques pris individuellement sont souvent inférieurs aux valeurs limites autorisées, cela n’implique pas une absence de conséquences à long terme, d’autant que femmes et hommes sont constamment exposés à des mélanges complexes de produits chimiques qui, jusqu’à présent, font l’objet uniquement d’évaluations séparées.

Source : www.cnrs.fr

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